Tout d'abord sachez que la photo de couverture de cet article a été prise lors notre second passage au col car lors du 1er, jour de notre arrivée, une pluie battante nous a empéchés de faire des photos...
Il en est de même pour la photo à l'entrée du CNEC !
A sa création, en 1824, elle est décrite comme étant la route de Perpignan à Mont-Louis et en Espagne par Puigcerdà. Elle succède alors à la Route impériale 136...
Puis la route nationale 116, ou RN116, fut la route nationale française reliant Perpignan (Ouest) à Bourg-Madame (Cerdagne). Elle se situait dans le département des Pyrénées-Orientales sur l'intégralité de son parcours.
Elle constituait l'une des rares routes nationales françaises à n'avoir subi aucune modification, amputation ou disparition en deux siècles d’existence : son tracé est toujours resté le même depuis l'origine, sauf pour les sections rectifiées ou déviées localement ou transformées en voie express. Seule son origine à Perpignan a fluctué, au gré des changements de tracé de la RN9...
Par suite de la réforme de 2022, cet axe est intégralement déclassé en 2024, et sa gestion initialement assurée par la DIR Sud-Ouest revient au département des Pyrénées-Orientales (66). Elle est renumérotée en D66.
Nous allons la suivre jusqu’au col de la Perche, après Mont-Louis, soit sur plus de 50 kilomètres.
Il y a pas mal de circulation, il faut dire que c’est un axe très important pour gagner l’ouest du département, l’Espagne, et l’Andorre...
Nous passons Prades, Villefranche de Conflent, Olette, ... Le passage dans certains villages est un peu étroit... Surtout que le trafic est assez dense avec notamment des camions...
Nous longeons parfois la voie ferrée et ses nombreux ouvrages d’art, de superbes viaducs...
A l’horizon le ciel s’obscurcit de plus en plus... Et nous craignons de subir la pluie avec un bel orage qui se prépare...
Nous connaissons bien la route donc nous ne nous attardons pas...
Cette fois pas d’arrêt à Mont Louis... Ni au monument d’Emmanuel Brousse... Mais quelques mots sur cet étrange monument et ce personnage.
Je reprends ici un bel article d’Hélène Legrais de France Bleu Roussillon sur ce monument.
« Curieux monument en effet que certains ont comparé malicieusement à la fusée de l’album de Tintin « Objectif Lune » et cette inscription, peu banale, surtout son dernier terme : « Au bienfaiteur de la Cerdagne, au défenseur de la viticulture, à l'apôtre des économies, au ministre mort pauvre » ! Cet homme exemplaire et dévoué à qui on rend ainsi hommage c’est Emmanuel Brousse, né en 1866 et décédé en 1926.
Dans la famille Brousse, on est journaliste. Le père, prénommé également Emmanuel, est le responsable de l’imprimerie de l’Indépendant. L’oncle, Louis, est journaliste et carrément directeur du même journal. Journaliste aussi, après avoir été pharmacien, le cousin Emmanuel-Robert. Journaliste donc Emmanuel junior. Et bien sûr seront journalistes ses quatre fils : Charles, Jean, Georges et, devinez, Emmanuel ! Pas facile de s’y retrouver …
Revenons au nôtre … Très jeune il commence comme typographe dans l’imprimerie familiale avant de commencer à écrire des papiers sur l’actualité locale. Le voilà rédacteur politique puis gérant de la société L'Indépendant pendant 28 ans. Il se lance dans l’arène politique : il est élu conseiller municipal de Perpignan puis conseiller d’arrondissement, et en 1895 conseiller général pour le canton de Saillagouse. Il est administrateur des hospices de Perpignan lorsqu'il se présente sous l’étiquette « Gauche Républicaine Démocratique » dans l'arrondissement de Prades aux élections générales législatives du 6 mai 1906. Dans sa profession de foi, il se prononce en faveur d'une politique « modérée, tolérante, ferme sur le plan extérieur, mais dénuée d'ingérence confessionnelle sur le plan intérieur ». Il est élu … Et restera député jusque deux ans avant sa mort.
Qu’a-t-il fait de particulier pour être considéré comme le « bienfaiteur de la Cerdagne » et le « défenseur de la viticulture » ?
Pour la Cerdagne, il se bat pour désenclaver les hauts cantons ((voir ma remarque plus bas)) et c’est lui qui est avec l’ingénieur Jules Lax à l’origine de la construction de la ligne du petit train jaune qu’il fait reconnaître d’utilité publique dès 1903. Quant à la viticulture, on est en pleine crise, les vignerons descendent dans la rue, Clemenceau va faire intervenir l’armée en 1907, il y aura des morts. Brousse fait voter par la Chambre une loi contre les fraudes et le sucrage, interpelle le gouvernement pour qu’on libère les meneurs du mouvement des gueux mis en prison. Après la Grande Guerre, il est nommé sous-secrétaire d’Etat aux finances pendant un an, de janvier 1920 à janvier 1921. Puis, de retour sur son banc de député, il œuvre à favoriser les vins doux naturels, à « sauvegarder du désastre les grands vins de France », et lutte contre « la hausse constante du prix de la vie ». Inlassablement. Sans jamais en tirer profit pour lui-même.
Il meurt le 17 novembre 1926 à Paris, à 60 ans, retiré de la vie politique après son échec aux législatives de 1924, battu par Victor Dalbiez. En souvenir de son dévouement désintéressé au Pays catalan, sa famille et ses amis lui érige le monument de Mont-Louis qu’il méritait bien, avouez … ».
Je préciserai juste un point concernant la route des cols des Pyrénées et le petit Train Jaune !
En effet, «précurseur dans l’âme, il prend très vite conscience de la puissance économique du tourisme et des perspectives qu’il ouvre au développement local, notamment pour l’arrière-pays et les zones de montagne, fortement pénalisés par le manque d’infrastructures routières réellement carrossables.».
Mais au-delà des routes il deviendra « l’un des très ardents impulseurs du Train Jaune dont on évalue à peine aujourd’hui les vertus de désenclavement, à l’aube du siècle dernier.».
C’est donc un peu grâce à lui que nous roulons à travers les Pyrénées Orientales et pouvons « faire » la route des cols !
Emmanuel Brousse meurt le 17 novembre 1926 à Paris.
En souvenir de son dévouement désintéressé et illimité au Roussillon, sa famille et ses amis lui firent ériger à l’entrée de Mont-Louis, cité inscrite au patrimoine mondial de l’humanité comme fortification de Vauban, un étrange monument signé du sculpteur Raymond Sudre, où trône une superbe et étonnante œuvre en bronze de l’architecte MAS-CHANCEL dédiée à cet enfant du pays.
Le monument, inauguré le 24 août 1930 par le sous-secrétaire d’Etat Victor Manaud se situe au carrefour des routes de Capcir, de Cerdagne et de Conflent, au milieu du rond-point qui fait l’angle entre la Route Nationale 116 et la Départementale 618. Le terrain a été donné au comité et le monument financé par une souscription publique. Au début des années 1990 : une demande de classement pour protection est formulée par les descendants d’Emmanuel Brousse après la création du rond-point. Depuis les travaux d’aménagement du rond-point dans les années 1990, il manque les prolongements latéraux de l’assise qui donnaient à l’édifice le surnom de « La fusée de Tintin » !
Les inscriptions sur le monument
Une petite rue, derrière la préfecture de Perpignan, porte également son nom et ce n’est pas un hasard : il n’y a pas si longtemps, c’est là que le journal l’Indépendant avait son siège !
Nous faisons le tour du monument et filons rapidement vers le col de la Perche, mais...
L’orage est sur nous, ou plutôt nous entrons dans l’orage... De grosses gouttes de pluie commencent à nous tomber dessus...
Par chance un petit espace sur le bord de la route nous permet de nous arrêter et de mettre le toit...
Presque pas mouillés !
Nous patientons un moment mais l’orage ne veut pas se calmer...
Quelques photos prises de l’intérieur de Z, ce sera tout ce qu’il nous sera possible de faire... Mais 2 jours plus tard nous ferons de meilleures images...
C’est un des 34 cols officiel de la route des cols des Pyrénées mais en réalité bien peu de personnes savent vraiment où il se trouve !
Nous avons réalisé un article complet uniquement à son sujet... Voir l’article suivant.
Donc nous ne nous attardons pas et nous filons vers le col de la Quillane.
Demi-tour jusqu’ au monument Emmanuel Brousse où nous prenons la D118 en direction de Formiguères. Nous passons devant les bâtiments du CNEC, Centre National d’Entraînement Commando que nous connaissons, voir notre article https://z4du34.com/2022/04/gorges-defiles.html.
Et nous arrivons, toujours sous la pluie, devant le col de la Quillane, ou col de Casteillou.
Le col de la Quillane, à 1 713 m d'altitude, marque la limite entre les communes de La Llagonne et de Matemale et les comarques du Conflent et du Capcir, entre les vallées de l'Aude et de la Têt.
Il fait partie des 34 cols de la route des cols des Pyrénées.
Le col de la Quillane est nommé Coll de la Quillana, parfois de La Guillana, en catalan. Ce nom a été donné, au Moyen Âge, à un hameau situé sur ce col et alors une dépendance de l'abbaye Saint-Michel de Cuxa. L'ensemble doit son nom à la ville de Quillan auquel le col permet d'accéder. La première mention connue du col est Quillanum en 959.
Le col est flanqué, au nord, par le puig del Castelló (du latin Castellum signifiant « château ») d’altitude 1 710 mètres : le col peut en conséquence être parfois nommé « coll de Castelló » ou « de Casteillon ». Ce qui se vérifie sur d’anciennes cartes postales...
Le col permet le passage entre les deux sommets suivants, les plus proches du col :
Pour la petite histoire c'est au col de la Quillane que Prosper Auriol et plusieurs de ses amis du Club alpin français ont effectué, le 29 janvier 1901, la première descente à ski des Pyrénées !
Enfin, juste avant le col se trouve l'aérodrome de Mont-Louis - La Quillane.
Sous le nom de code OACI : LFNQ c’est un aérodrome d’altitude surtout destiné à la pratique du vol à voile.
Il possède une piste en herbe de 1 000 m de long pour 80 m de large pour les planeurs ainsi que 2 hangars.
Son origine remonte à 1957. Cette année-là, avec l’accord du Comité Directeur de l’ACL, les démarches sont entreprises pour finaliser l’installation d’un aérodrome à La Llagonne. Le projet est fort bien accueilli par le Maire du village Jean Aspero. La personnalité et les relations d’André Allard Président de l’Aéroclub du Languedoc furent déterminantes dans la concrétisation du projet. Et c’est le 29 octobre 1957 que l’aérodrome de Mont Louis fut officiellement inauguré.
La suite de l’histoire sur le site https://planeur-la-llagonne.com/
Mais revenons au col de la Quillane...
Nous le contemplons de l’intérieur de Z sous une pluie qui redouble... Et qui ne se calmera pas...
Nous essayons de faire quelques photos et nous partons pour Formiguères...
Mais nous reviendrons le surlendemain avec le soleil !
Fin de l’épisode et du jour 1 mais un dernier épisode qui suit traite exclusivement du mystérieux col de la Perche...